Comment les droits de douane américains pourraient-ils impacter les taux hypothécaires canadiens ?
Cet article a été initialement publié le 6 mars 2025 et mis à jour le 3 avril 2025.
Après plus de deux mois d'incertitude - et d'hostilité sans précédent - autour des relations commerciales entre les États-Unis et le Canada, des éclaircissements ont été apportés le 2 avril sur la forme et l'ampleur des droits de douane imposés par les États-Unis sur les importations canadiennes et mondiales.
Lors d'une conférence de presse tenue à 16 heures (heure de l'Est), le président américain Donald Trump a annoncé que les États-Unis imposeraient des droits de douane réciproques de 50 % à une série de pays présentant des excédents commerciaux américains, qui entreraient en vigueur le 9 avril, ainsi que des droits de douane de base de 10 % pour tous les partenaires commerciaux américains, qui entreraient en vigueur le 5 avril. Le Canada a toutefois été exempté de la liste des tarifs réciproques ; la structure tarifaire actuelle restera en place. Les marchandises couvertes par l'accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) sont ainsi exemptées, un prélèvement de 25 % restant en place pour les importations non couvertes par l'accord ACEUM. Le Canada sera également soumis aux droits de douane généraux de 25 % imposés par Trump sur les automobiles et les pièces détachées étrangères, ainsi qu'à la taxe de 25 % sur les produits en acier et en aluminium, qui est entrée en vigueur le 12 mars.
La réponse tarifaire du Canada reste en vigueur : un droit de douane en nature de 25 % sur 30 milliards de dollars de marchandises américaines, entré en vigueur le 4 mars, et une deuxième mesure de rétorsion sur 29,8 milliards de dollars de marchandises supplémentaires, entrée en vigueur le 13 mars. Une troisième série de mesures, qui porterait sur 95 milliards de dollars supplémentaires, reste en suspens à la suite de l'annonce d'hier.
Si l'exemption du Canada des droits de douane réciproques apporte un léger soulagement à notre économie, le fait que les États-Unis aient intensifié la guerre commerciale plus largement que prévu a plongé les marchés mondiaux dans la tourmente. Les contrats à terme des trois grands marchés américains - le S&P 500, le Dow Jones Industrial Average et le Nasdaq - ont tous plongé avant la cloche d'ouverture du 3 avril. Dans l'ensemble, CNN rapporte qu'une « peur extrême » anime le marché boursier, le S&P ayant baissé de 5 % depuis le début de l'année et se dirigeant vers son pire trimestre depuis septembre 2022.
Cette situation se répercute fortement sur le marché obligataire. Le rendement du Trésor américain à 10 ans, qui sert de référence pour les prix de la dette mondiale, a chuté de près de 20 points de base au cours de la nuit pour atteindre 4,04 %, rapporte BNN Bloomberg, avant de remonter à 4,11 % à l'ouverture du marché.
Les rendements des obligations du gouvernement canadien ont suivi le mouvement, tombant à 2,488 % à l'heure de la publication le 3 avril - un niveau plancher jamais atteint depuis avril 2022. Cela exerce une forte pression à la baisse sur les taux hypothécaires fixes, qui ont déjà été fortement réduits au cours des dernières semaines.
Voici ce que les emprunteurs d'aujourd'hui devraient envisager.
Les rendements obligataires ont chuté et les taux fixes ont baissé
Le bon côté des tarifs douaniers et des bouleversements qu'ils entraînent sur les marchés est qu'ils poussent les rendements obligataires, et par extension les taux hypothécaires fixes, à redescendre à des niveaux inégalés depuis trois ans.
En effet, les investisseurs craignent de plus en plus une récession imminente au Canada et aux États-Unis, ainsi qu'une stagflation, c'est-à-dire une hausse de l'inflation en dépit d'une faible croissance économique. Les prévisions d'inflation sont à la hausse dans les deux pays et, bien que les derniers chiffres du PIB canadien se soient révélés plus élevés que prévu, la croissance devrait se ralentir rapidement après la publication des chiffres de février.
Les investissements dits « refuge », tels que les obligations d'État canadiennes, n'en sont que plus attrayants. Les rendements des obligations d'État canadiennes à cinq ans - que les prêteurs utilisent pour fixer le prix de leurs taux hypothécaires fixes - ont diminué parallèlement à l'annonce des tarifs douaniers, tombant à 2,57 % le 1er avril et se situant dans la partie supérieure de cette fourchette le 2 avril, dans les heures qui ont précédé l'annonce.
En conséquence, les prêteurs sont devenus plus compétitifs avec leurs taux hypothécaires fixes ; parmi les meilleures offres au Canada, on trouve un taux fixe de cinq ans pour les emprunteurs assurés à 3,74% - encore une fois, un niveau bas jamais vu depuis l'été 2022 - et une option de 3,99% pour les emprunteurs non assurés. Pour ceux qui cherchent à bloquer leur prêt ou qui sont sur le point de le renouveler, il s'agit là de coûts d'emprunt fixes parmi les plus attractifs depuis un certain temps.
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Quelle est la prochaine étape pour la Banque du Canada ?
Initialement, les économistes pensaient que la banque centrale serait contrainte de réduire son taux directeur Overnight Lending Rate - qui sous-tend la tarification des taux hypothécaires variables - plus que prévu, peut-être jusqu'à 1,5 %, afin de lutter contre les effets d'une récession induite par les droits de douane.
Mais la Banque du Canada elle-même a jeté un froid sur les attentes en matière de réduction des taux. Dans le résumé des délibérations, qui analyse la décision du Conseil des gouverneurs du 12 mars concernant l'annonce des taux, la BoC indique clairement qu'elle aurait maintenu les taux inchangés sans les dommages économiques causés par l'incertitude sur les tarifs douaniers.
Dans plusieurs discours, le gouverneur de la BoC, Tiff Macklem, a également déclaré que la politique de taux de la banque centrale ne pouvait à elle seule contrer une guerre commerciale et qu'elle devrait être accompagnée de mesures fiscales, telles que des dépenses publiques. Il a également précisé que, compte tenu de l'incertitude actuelle, la Banque serait moins prévoyante que d'habitude, ce qui signifie qu'elle réagirait à court terme à l'évolution des droits de douane.
À l'heure actuelle, les paris penchent en faveur d'un maintien des taux lors de la prochaine annonce de la BdC le 16 avril, même si la Banque surveillera de près l'évolution de l'économie mondiale, le ralentissement de la conjoncture aux États-Unis, ainsi que la croissance et l'inflation au Canada.
Quel sera l'impact des tarifs douaniers sur le marché du logement ?
Dans un scénario non tarifaire, tout laissait présager un printemps dynamique pour l'immobilier canadien ; la baisse des taux hypothécaires, combinée à une demande refoulée, avait même incité l'Association canadienne de l'immobilier à revoir ses prévisions pour l'année, tablant sur une augmentation des ventes de 8,6 % en 2025, au lieu de 6,6 %. Le prix moyen d'un logement au niveau national devrait augmenter de 4,7 %, pour atteindre 722 221 $.
Toutefois, les craintes concernant les tarifs douaniers ont jeté un froid profond sur la demande du marché du logement. Les données les plus récentes de l'Association canadienne de l'immobilier pour le mois de février montrent que les ventes ont baissé de 10,4 % d'une année sur l'autre et de 9,8 % par rapport à janvier, ce qui représente le plus bas niveau de transactions depuis novembre 2023 et la plus forte baisse mensuelle depuis mai 2022.
« Dès l’annonce des tarifs, le 20 janvier, un fossé s’est creusé entre les ventes résidentielles enregistrées cette année et celles de l’année dernière. », a déclaré Shaun Cathcart, économiste principal de l'ACI, dans le communiqué de presse de l'ACI. « Cette tendance s’est accentuée tout au long du mois de février, entraînant une baisse significative, mais peu surprenante, de l’activité mensuelle, a déclaré Shaun Cathcart, économiste principal de l’ACI. Cela se traduit déjà par une nouvelle baisse des prix, en particulier dans la région du Grand Golden Horseshoe, en Ontario. »
Il est clair que tant qu'une véritable clarification ne sera pas apportée sur les tarifs douaniers - et leur impact sur l'économie canadienne - les acheteurs de maisons ne sont pas enclins à se précipiter sur le marché s'ils n'ont pas les moyens de le faire.
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Penelope Graham, Directrice des contenus
Penelope Graham a plus de dix ans d'expérience dans le domaine de l'immobilier, des hypothèques et de la finance. Ses commentaires sur le marché du logement sont publiés dans les médias nationaux et locaux.